MAROC - Financement. Focus sur les fonds d’investissement et leur business model



MAROC - Financement. Focus sur les fonds d’investissement et leur business model

De par leurs prises de participation dans le capital des sociétés, les fonds d’investissement sont considérés comme des associés à part entière de la société investie pendant une durée qui est toutefois limitée dans le temps, variant généralement entre quatre et sept ans avant leur sortie du capital. "Un fonds d’investissement est à distinguer d’une holding d’investissement. Cette dernière est généralement liée à des groupes industriels ou financiers dont la durée de vie et d’investissement sont illimitées", nuance Khalil Azzouzi, joint par Médias24.


Les fonds d’investissement ont pour vocation d’apporter les fonds, le savoir-faire, l’expertise et le réseau relationnel dans un objectif d’accélération de croissance et de création de valeur aux parties prenantes des sociétés investies. En effet, le fonds d’investissement est composé de deux structures juridiques : l’une portée par l’équipe de gestion et l’autre dédiée au fonds levé auprès des investisseurs.


Khalil Azzouzi explique que l’équipe de gestion, constituée en société de gestion, est appelée communément General Partners (GPs). Sa mission est la gestion opérationnelle du fonds et la prise de décisions concernant le financement des projets sélectionnés. Elle démarche, analyse et sélectionne les projets cibles, et assure ensuite un accompagnement stratégique préliminaire avant d’aboutir à un modèle économique qui doit se traduire en un plan d’affaires (Business Plan), relayé par les investisseurs des fonds, ou Limited Partners (LPs), qui apportent les fonds nécessaires pour investir dans les projets. Les sociétés de gestion ont pour vocation de lever plusieurs fonds et de les gérer. Chaque fonds peut avoir une stratégie d’investissement et des investisseurs différents. L’équipe de gestion, elle, demeure le pilote de ces fonds.


Les LPs peuvent être des institutions financières internationales ou locales, et parfois des industriels ou family offices. Par exemple, les bailleurs de fonds qui constituent le tour de table d’Azur Innovation Fund sont Tamwilcom (ex CCG), la Banque africaine de développement, le fonds de développement du gouvernement hollandais (DGGF) et de la banque allemande de développement KFW, CIH Bank, BMCE Bank of Africa, Sanlam et l’agence Masen. "Au total, 99% de l’enveloppe d’un fonds provient généralement des LP’s et 1% de l’équipe des GPs. La prise de participation de ces derniers a une dimension d’implication et de prise de responsabilité et de risque quant à l’alignement des intérêts des parties", précise notre interlocuteur. Une fois le fonds d’investissement créé, il est constitué généralement en société anonyme (SA) avec les organes de gouvernance y afférents.


Les deux parties constituent un comité d’investissement pour valider ou non la prise de participation dans les projets proposés par l’équipe de gestion. Deux modèles de comités d’investissement coexistent : les fonds d’investissement avec des comités d’investissements discrétionnaires dont la décision d’investissement revient à l’équipe de gestion, et des membres experts indépendants invités auxdits comités. L’autre modèle, qui est non discrétionnaire, délègue le pouvoir de décision aux investisseurs des fonds qui siègent au comité d’investissement. Dans ce dernier modèle, l’équipe de gestion n’a aucun pouvoir dans la décision d’investissement.


Le modèle d’affaires d’un fonds d’investissement

"Il faut dissiper le mythe selon lequel un fonds d’investissement, et encore moins un fonds de capital-risque, sont des mécanismes de financement à fonds perdus", lance Khalil Azzouzi. Il explique que le fonds d’investissement, comparé aux autres outils de financement, qui sont essentiellement basés sur de la dette, demeure plus risqué et est régi par des concepts de choix d’investissements, de bonne gouvernance et d’éthique, et de calculs économiques rigoureux.


En effet, l’équipe de gestion est engagée vis-à-vis des investisseurs sur un rendement minimum, communément appelé "taux de rendement interne" (TRI), ou "hurdle rate", qui répond aux attentes des actionnaires du fonds en matière de rentabilité économique attendue. En effet, si les projets investis connaissent la réussite espérée par l’équipe de gestion, le TRI devrait se situer au-delà de l’objectif fixé par les investisseurs. La plus-value dégagée au-delà du TRI fixé est distribuée à hauteur de 20% (carried interest) pour l’équipe de gestion, et de 80% pour les investisseurs, en plus du capital initial et du rendement minimum promis par l’équipe de gestion (hurdle rate)", explique l’investisseur.


La majorité des fonds d’investissement interviennent dans les capitaux des projets à titre minoritaire. Ce qui veut dire que les fondateurs des projets gardent la main dans la gestion quotidienne de leur projet. Néanmoins, l’équipe de gestion, en tant que membre du conseil d’administration, continue d’apporter son soutien, son savoir-faire, son expertise et ses conseils stratégiques en plus de son réseau relationnel aux porteurs de projet. "Ceci est d’autant plus important pour les startups, qui manquent souvent d’expérience en matière de gestion d’entreprises", souligne l’investisseur.


Et, alors que la phase d’investissement dure quatre à sept années, vient ensuite la phase de désinvestissement qui compte en moyenne cinq années, durant laquelle toutes les participations devraient être cédées, à travers plusieurs options préalablement convenues avec les promoteurs des projets à travers un pacte d’actionnaires. Les différentes options consistent en la cession des participations du fonds aux fondateurs, la cession à des investisseurs stratégiques quand les fondateurs ne souhaitent pas le rachat de la participation du fonds, l’introduction en bourse quand les fondamentaux de la société le permettent ou encore la cession des participations à des fonds de développement qui souhaiteraient reprendre le relais des fonds initiaux pour accompagner les projets vers de nouveaux horizons.


Au-delà de la dimension financière et économique, les fonds d’investissements de la nouvelle génération sont tous engagés sur des performances en termes d’impact social, environnemental et de gouvernance (ESG). "C’est ce que nous appelons les fonds d’investissements à impact, dont nous faisons partie", souligne notre interlocuteur.


Comment un fonds d’investissement lève-t-il les fonds ?

"Le processus de levée de fonds est long et fastidieux. Entre la préparation du mémorandum à présenter aux investisseurs et la levée effective d’un fonds appelée closing, il faut compter 18 à 24 mois en moyenne", précise notre interlocuteur. En effet, l’équipe de gestion doit convaincre les investisseurs potentiels moyennant la rédaction d’un mémorandum reprenant l’expérience de l’équipe de gestion, ses compétences, ses réalisations, la stratégie d’investissement proposée, son impact socio-économique et environnemental, la pertinence des choix sectoriels et du marché cible, le mode et les modalités de prise de participation dans les projets, le rendement cible du fonds à lever, le mode de gouvernance en place, ainsi que les projets cibles identifiés appelés deal flow.


Pour ce faire, l’équipe de gestion organise un "road show" durant lequel les investisseurs potentiels du fonds, aussi bien locaux qu’internationaux, sont approchés pour leur présenter le projet de levée de fonds, ses projections et ses perspectives. Viendra par la suite la phase juridique et légale assistée par les avocats d’affaires des différentes parties pour ficeler le partenariat avec les droits et obligations de chacun des acteurs, régis par des contrats qualifiés de pactes d’actionnaires entre investisseurs, et par un règlement de gestion détaillé de la société de gestion. Plus le nombre d’investisseurs est important, plus les compromis prennent en général du temps à aboutir.


La durée de vie d’un fonds d’investissement est en général de dix ans, extensible de deux années suivant les cas. La gestion du fonds est déléguée à l’équipe de gestion (GPs) moyennant un engagement contractuel qui couvre les aspects liés aussi bien à la bonne gouvernance, à l’éthique et à la déontologie qu’à la performance.


source: medias24.com

A voir aussi