MAROC - Ce que dit le projet de loi sur les administrateurs indépendants dans les entreprises publiques



MAROC - Ce que dit le projet de loi sur les administrateurs indépendants dans les entreprises publiques

Soumis à la Commission des finances de la Chambre des représentants, le projet de loi n°40.22 fixant le nombre d’administrateurs indépendants ainsi que les conditions et la procédure de leur nomination dans les organes consultatifs des entreprises publiques, entame son parcours législatif.

Si le texte est adopté, les entreprises publiques devront adapter leurs situations aux dispositions de cette loi dans un délai de deux ans à partir de sa publication au Bulletin officiel.

La notion d’indépendance, dont les prémices en droit marocain remontent au Code de bonne gouvernance publié en 2008, désigne le regard objectif porté sur l’entreprise. Mais cette notion comporte une problématique : celle de la gestion de l’indépendance, de l’éthique et de la morale.

Le projet de loi 40.22 pose de nombreuses conditions pour verrouiller les conditions de nomination d’administrateurs indépendants, dont le nombre ne peut dépasser le tiers du total des membres des organes consultatifs des entreprises publiques, en tenant compte du principe d’équité avec les représentants de l’Etat et de l’importance des activités de l’entreprise, ainsi que de la nature des risques auxquels elle fait face. C’est ce que prévoit l’article 1er du texte en cours d’examen au Parlement.

Une liste d’incompatibilités pour assurer l’indépendance

Ainsi, le projet de loi définit l’administrateur indépendant comme celui qui n’entretient aucune relation juridique ou professionnelle avec l’entreprise publique concernée par sa nomination dans ses organes consultatifs. L’absence de relation juridique ou professionnelle peut se présenter sous différentes formes listées dans le texte.

A titre d’exemple, le projet de loi autorise la nomination d’un administrateur indépendant qui n’a pas, durant les trois années précédant sa nomination, été salarié ou membre de l’organe d’administration, de contrôle ou de gestion, dans l’entreprise publique concernée.

Le projet de loi énumère différents cas d’incompatibilité, notamment celui où l’administrateur indépendant entretient une relation de parenté avec un actionnaire, un membre du conseil d’administration ou de contrôle de l’entreprise publique concernée, voire même avec leurs époux.

Le texte va même jusqu’à étendre les cas d’incompatibilité à ceux prévus par d’autres textes de loi, précisant que si une situation d’incompatibilité a lieu pendant que l’administrateur indépendant exerce ses fonctions, celui-ci doit y mettre fin immédiatement et avertir l’organe consultatif dans un délai de quinze jours.

En outre, il est exigé, via ce texte, que l’administrateur indépendant nommé soit doté de capacités et d’aptitudes nécessaires lui permettant d’exercer ses missions, à savoir celles liées à l’activité de l’entreprise, ainsi qu’au domaine de la gestion et de l’analyse financière. Il doit avoir "une expérience professionnelle reconnue dans son domaine d’expertise".

Avant sa nomination, l’administrateur indépendant doit déclarer, par écrit, au président de l’organe consultatif, toutes les fonctions qu’il occupe et toutes les actions dont il dispose.

Une fois nommé, il jouit des mêmes droits que les autres administrateurs et membres, y compris le droit de vote au sein des organes consultatifs, à l’exception des assemblées générales auxquelles il a le droit d’assister. Il a également les mêmes obligations, conformément aux principes d’indépendance, d’objectivité et de neutralité.

Des critères qui font plonger l’administrateur indépendant dans un profond dilemme, comme le précisent des praticiens, notamment Me Nawal Ghaouti. Cette avocate au barreau de Casablanca a, dans une tribune publiée dans nos colonnes, soulevé une des problématiques liées à la nomination d’administrateurs indépendants dans le secteur privé.

"On attend de lui (l’administrateur indépendant) qu’il soit suffisamment détaché pour correspondre aux critères d’indépendance mais en même temps, on doute qu’il soit suffisamment proche de l’entreprise pour la comprendre, la connaître et donc la contrôler", explique-t-elle.

"Cette problématique relative à la gestion du degré d’indépendance et d’interdépendance des mandataires sociaux, aurait pu demeurer cantonnée au domaine de l’éthique et de la morale des affaires, et soumise uniquement à l’appréciation des parties prenantes de l’entreprise, et en premier lieu de ses actionnaires. Mais sous le coup des scandales financiers qui ont secoué le monde ces dernières décennies et déstabilisé bien des systèmes économiques, les organismes internationaux comme les investisseurs institutionnels ont fortement promu l’intégration du concept d’administrateur indépendant dans la sphère normative, jusqu’à en faire un élément clef du dispositif légal des sociétés anonymes cotées", souligne-t-elle.


source: medias24.com

A voir aussi